Corinne Rouveyre : une femme au cœur de l’art abstrait lyrique

Une artiste originale, une œuvre singulière

 

 

  Les tableaux de Corinne Rouveyre semblent tout droit sortis d’un laboratoire alchimique, fruits d’une fusion métaphysique au creux de l’athanor secret dont se sert sûrement cette artiste surprenante.

  Il y a dans sa peinture du biologique, du moléculaire, du minéral, du chimique, de l’aurifère et du mercurien, tout cela mélangé et en pleine transmutation, en réaction atomique devant le regard saisi du spectateur attiré.

   Nous avons tous en tête aujourd’hui, au XXIe siècle, grâce à la puissance des nouvelles imageries scientifiques, des représentations de galaxies spirales, de nébuleuses, d’étoiles géantes rouges et autres merveilles interstellaires. Nous en avons aussi une mémoire intime ultra profonde, hypothalamique, universelle, et nous portons tous quelque chose de cette empreinte, dans les couches liminaires de notre inconscient, gravée en nous au moment de notre naissance, et qui contient les souches génétiques de notre imaginaire et la notion de notre perte, de notre contingence, la sensation de vide vertigineux au-dessus duquel nous sommes tous suspendus, et les rêves d’éclatements cosmiques que nous faisons parfois dans l’enfance, ou dans l’amour.

Chez Corinne Rouveyre, cette empreinte, comme une clé de talent, a ouvert la porte à la plus grande expansion créatrice.

   La peinture de Corinne Rouveyre a en effet (dans l’effet, au sens strict) quelque chose de cosmique, en lien avec l’univers en expansion, fouillis d’étoiles innombrables et de galaxies spirales en mouvement. Des explosions, des matières que l’on dirait vivantes, jaillissent comme des bulles d’émail bouillonnantes sortant du four du joaillier céleste.

Des rouges puissants transpercent l’espace, dont les fonds sont de bleus céruléens, veinés de lapis-lazuli, côtoyant des verts d’émeraude liquide, se perdant en une effervescence de mauve et de turquin, melting-pot d’émotions pigmentées, marbrures d’univers révélées sur la toile comme la projection exaltée d’une vision intérieure infusée longtemps et relâchée ‘d’un coup’.

 

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  D’autres réalisations mènent au centre du minéral, comme une plongée au cœur du relief atomique de l’élément, à la façon de ces caméras volantes ou miniaturisées qui survolent le Grand Canyon ou progressent dans un circuit veineux, celle-là évoluant dans le tableau pour contourner des boursouflures chimiques, longer des vallées de cæruleum, dépasser des caps de cobalt, échappant à des fumerolles volcaniques, poussant vers le regard des vitrifications quasi nucléaires, montrant ce qu’au fond sont les vraies choses.

 

  La peinture de Corinne Rouveyre impressionne, dans le sens premier du terme, mais pas que cela : elle montre quelque chose, forcément, une image mentale, évidemment, de la couleur conteuse de monde, mais pas seulement ; aussi du sentiment, de la pensée, du sens, de l’idée, de l’émotion, de la peur, de la jouissance, du vivant, de la mémoire, de la matière noire, des supernovæ, de la douceur et de la brutalité, de la sensualité, de la joie, de la tristesse, de la nostalgie et du rire, toute la palette, la gamme des émotions humaines : une formidable, explosion créative associée à un talent indiscutable.

 

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  Telle un Vulcain plasticien, Corinne Rouveyre forge sa peinture sur l’enclume de son mental, dans un rougeoiement de pigments, un foisonnement d’étincelles projetées, remuant le corium coloré avec art et détermination, rythmant avec énergie les coups de pinceaux, convaincue de l’essentialité de l’œuvre à réaliser.

  L’expressionnisme abstrait dont pourrait être qualifiée sa peinture dévoile en réalité un lyrisme incarné, qui jaillit des œuvres, et qui la relie surtout au courant de l’abstraction lyrique, où elle imprime, en tant que femme et artiste, une marque originale et authentique, où elle s’impose en maître plasticienne, magicienne de la couleur et de ses rayonnements intimes, au-delà de la toile, au fond des yeux et du cœur du spectateur médusé.

  Cette affiliation est incontestable, sa gestuelle graphique le prouve, son expression enflammée l’atteste. Corinne Rouveyre a pris une place de choix parmi les artistes abstraits lyriques actuels, dont les œuvres sont appréciées de plus en plus et partout dans le monde, au Brésil, aux Etats-Unis, en Albanie, en Italie, en Allemagne, en Espagne, et en France, bien sûr : une profusion enthousiasmante et une créativité renouvelée sans cesse sous les formes les plus diverses.

   Lorsque François Garros m’a parlé du travail de Corinne, je ne l’avais encore jamais rencontrée et ne me faisais aucune idée particulière du personnage ; à la limite, qu’importe.

  Comme l’écrivait si bien Verlaine, dans le poème ‘Mon rêve familier’, « est-elle brune, blonde ou rousse, je l’ignore… » ; et cela ne change rien à sa peinture.

Cependant, la rencontre physique m’a permis de découvrir un être de charme, de puissance et d’humour, doté d’une détermination sans faille pour communiquer et transmettre sa peinture, comme une mission vitale pour elle. Qu’ensuite j’apprenne qu’elle dessine depuis très jeune, qu’elle est née dans une famille d’artistes, qu’elle aime voyager, m’informe sur sa personnalité, et parfois peut aider à mieux comprendre telle ou telle démarche artistique. Mais ce n’est pas l’essentiel, je n’ai jamais rencontré Van Gogh ni Picasso, et rien lu sur eux avant de voir leurs œuvres, ce qui ne m’a pas empêché de les apprécier.

Elle dit qu’après le dessin, lorsqu’elle a découvert la peinture, elle a pu exprimer tout ce qu’elle ne pouvait pas écrire ; elle me permet aujourd’hui d’écrire ce que je ne sais pas peindre.

   Pour ceux qui seraient intéressés par sa biographie, son parcours, ses expositions, la modernité lui permet d’avoir un site internet, http://www.corinnerouveyre.com, où il sera possible de se renseigner utilement ; mais il vaut mieux, dans la mesure du possible, aller voir ses œuvres à l’occasion d’une exposition, vivement recommandé.

  Le Collectif 1 est un groupe d’artistes réunis à l’initiative de François Garros autour d’un projet dont la vocation est de faire connaître et promouvoir l’abstraction lyrique actuelle et à rassembler les artistes qui la pratiquent ; Corinne Rouveyre y a une place d’administratrice qui lui permet de faire rayonner son travail à l’occasion de certaines actions organisées par le groupe, à La Rochelle, Cholet ou Angoulême en 2015 et un échange d’œuvres avec le Brésil.

Elle s’inscrit ainsi dans ce grand mouvement actuel rénovateur de l’abstraction lyrique, par l’ampleur de sa palette, la force de son émotion, sa liberté d’expression, ses explosions créatives, sa féminité engagée dans l’art et, par-dessus tout, un talent incomparable.

 

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